De la madeleine de Commercy à la madeleine de Proust

Published by Nicolas Ragonneau on

Panneau touristique sur l'autoroute
Sur l’autoroute A10, environs d’Illiers-Combray, Eure-et-Loir

« J’tai chouravé ton bas de laine,
et maintenant tu chiales comme une madeleine…
allez ouste !
Prends encore une dose de Proust ! »

Alphonse Boudard


Comment la madeleine de Proust a éclipsé la madeleine de Commercy : une étude littéraire, économique et gastronomique truffée de chiffres et utilisant les ingrédients du web-marketing contemporain. Ajoutez du beurre et des œufs. Mêlez le tout. Laissez reposer 24 heures. Dégustez légèrement tiède, ou froid — comme le plat de la vengeance de la littérature sur le Réel. 

Un simple gâteau de la Meuse est devenu, accolé au nom de Proust, et en un peu plus d’un siècle, un poncif littéraire universel, une expression populaire pour désigner un tendre souvenir d’enfance plus ou moins niais, un symbole de la mémoire involontaire, l’icône des sciences cognitives (Jean-Yves Tadié, un des premiers à avoir évoqué cette dimension dans des conférences, n’y est pas totalement étranger), une métaphore érotique, j’en passe et des meilleures : la madeleine s’est transformée en tarte à la crème mondialisée de ceux qui mettent Proust à toutes les sauces. 

Râteau à Illiers-Combray

« Non monsieur, on n’a pas de madeleines ici » me dit sèchement la boulangère d’Illiers-Combray, dont la devanture reproduit pourtant un portrait de Marcel d’un vert criard quasi martien.  « Il y avait bien un pâtissier qui avait le monopole sur tout ça, mais c’est fermé maintenant ». Avec le temps, les proustoparigots comme moi, elle les voit venir de très loin… Et pourtant, en ce jeudi après-midi de janvier, la Maison de la tante Léonie est fermée. Les rues sont désertes, mais la madeleine est partout à Combray, sur la devanture de ladite pâtisserie, sur la vitrine de La Boîte à pains ou Maison de la Proustille, l’autre boulangerie-pâtisserie qui avait soi-disant le monopole de la madeleine — désormais fermée depuis 2018. « C’est ici que ‘Tante Léonie’ achetait ses madeleines » proclame toujours le pas de porte de ce commerce abandonné. Son ancien propriétaire a ouvert un autre commerce rue St-Hilaire. La madeleine est également visible sur un cabas vendu à l’office de tourisme et, à quelques kilomètres de là, en double sur un des panneaux marron de l’autoroute A10, qui avertit de façon péremptoire : « Le Combray de Marcel Proust ».

La madeleine historique

Jusqu’en 1913 évidemment, la période pré-Swann, les choses étaient beaucoup plus simples : la madeleine ne pouvait être que de Commercy (ou à l’extrême rigueur de Liverdun ou de Stenay). Cette petite ville de la Meuse, à 54 km de Verdun comme de Nancy, en était le berceau attitré et l’épicentre depuis au moins le XVIIIe siècle, bien que la genèse de la pâtisserie demeure assez nébuleuse. La littérature gastronomique évoque la plupart du temps une sorte de brioche  médiévale cuite dans une coquille St-Jacques (Illiers était d’ailleurs sur une des routes menant les pélerins à St-Jacques de Compostelle, et Illiers-Combray l’est toujours) en guise de point-origine. Puis c’est la légende d’une servante nommée Madeleine (Madeleine Paulmier, née à Stenay, pas Madeleine Lemaire) qui aurait remplacé au pied levé le pâtissier du roi Stanislas, Duc de Lorraine, et qui aurait, dans une sorte d’intuition géniale, inventé ce gâteau. 

Biscuits en forme de melons

Le gâteau de Commercy est également installé dans l’histoire grâce à sa boîte traditionnelle ovale en sapin des Vosges puis en hêtre, commercialisée encore aujourd’hui, et la création de la ligne de chemin de fer Paris-Strasbourg en 1852. Sur le quai de la gare de Commercy où le train stationne, on autorise les Commerciennes, par arrêté préfectoral, à vendre des madeleines à partir de 1874 et jusqu’après la guerre de 39–45.

vendeuses de madeleines à Commercy
Une image d’Épinal, mais à Commercy : les vendeuses de madeleines attendent les voyageurs sur le quai de la gare

Le secrétaire de Bismarck, qui rentre dans la ville avec l’armée prussienne pendant la guerre de 1870, évoque « des biscuits en forme de petits melons » comme le signale le site de l’Office de tourisme — et pas du tout une coquille St-Jacques. Ce marché ambulant décuple grandement les ventes du gâteau et favorise sa diffusion dans l’Hexagone.
La madeleine de Commercy fait alors partie d’une trilogie qu’on appelle les trois délices de la Meuse, qui comprend également les groseilles épépinées de Bar-Le-Duc et les dragées de Verdun. La notoriété de Commercy culmine pendant la Grande Guerre : la ville devient alors l’hôpital de Verdun et d’Apremont — et une gigantesque nécropole.

Production de madeleines et chemin de fer
Avec le train, la production de madeleines de Commercy s’envole. Source : Maître Colas (vers 1890), cité dans Il était une fois… la madeleine de Michel Caffier (La nuée bleue, 2006).

Industrie et grande distribution

Après la Seconde Guerre mondiale, la madeleine devient un produit ubiquitaire et industriel, très connu à l’export, et l’identité commercienne se dilue irrémédiablement. StMichel, le leader sur ce marché, présent sur le site de production historique de Commercy, y fabrique seulement 10% de sa production. En hypermarchés comme en supermarchés de proximité, la part de marché de la madeleine est considérable et c’est le produit phare de la catégorie « pâtisserie industrielle ».
Le gâteau lorrain représente 40% des volumes de ventes de la grande distribution dans la catégorie « pâtisserie industrielle traditionnelle » (595 millions d’euros en 2018 CAM à P3) et elle « reste une valeur sûre, bien ancrée dans cette tendance du retour au produit authentique, traditionnel, et qui est à la fois simple et rassurant » selon le directeur du marketing de StMichel Stéphane Brunerie. « C’est le principal levier de croissance de la catégorie » ajoutait-il dans un article de LSA (le magazine des professionnels de la grande distribution) en octobre 2018, affirmation qui s’est confirmée en 2019 (+3,4 %). La pâtisserie industrielle représente un chiffre d’affaires (CA) annuel de 2,33 milliards d’euros (chiffre 2017). Pour le seul réseau Franprix (900 magasins), la madeleine correspond à 23% du CA dans cette catégorie.

Madeleines artisanales et haut de gamme

Et évidemment, on ne parle même pas des ventes de madeleines artisanales dans le très gros réseau des boulangeries-pâtisseries de France, lequel n’a pas daigné répondre à mes questions pour les besoins de cet article. Pour se faire un ordre d’idée cependant, une boulangerie-pâtisserie de banlieue parisienne comme le Cœur de Chennevières, située comme son nom l’indique au centre de Chennevières-sur-Marne (Val-de-Marne, 18000 habitants), écoule environ 650 madeleines par mois. En retranchant un mois d’activité (fermeture pour vacances d’été), on parvient à un cumul de 7000 madeleines vendus par an.
Elle a aussi colonisé les magasins bio (qui en aurait douté ?) où elle est souvent vendue sous sachet individuel, à la caisse. Et elle est montée en gamme récemment avec la création de La Madeleine de Proust par Maxime Beucher. 

Le Ritz ne pouvait pas non plus ignorer son passé proustien, et c’est la raison pour laquelle le chef François Perret a créé l’incroyable madeleine entremets, au cœur de miel de châtaigne. Ce ne sont que quelques exemples, parmi tant d’autres. Sucrée, elle serait déjà souveraine, mais comme si ce n’était pas assez, elle se décline aussi dans des versions salées : Catherine et Bénédicte Liber, libraires au café littéraire Liber&Co de Palais (Belle-Île en mer) en préparent de délicieuses pour leurs réunions proustiennes.
Je confesse un faible pour la version japonaise de la madeleine, au thé vert et au yuzu, telle que le chef Hisayuki Takeuchi en a fixé la recette dans le yuzu, dix façons de le préparer (Les Éditions de l’Épure, 2004). 

Pratique, rentable, proustienne

La madeleine est pratique : elle est portionnable, on peut l’emporter partout sous sachet, notamment dans son sac de classe et dans la cour des écoles, c’est vraiment un gâteau de poche qui convient bien à ce que les professionnels du secteur appellent « la consommation nomade ». Par ailleurs, le produit rassure les mères de famille par son côté authentique, simple et ancré dans le terroir. Mais son succès tient aussi à un facteur plus trivial : la madeleine est rentable car ses ingrédients sont communs et bon marché, et on peut ajouter beaucoup de valeur au produit de base. Le nom de Proust accolé à madeleine participe de cette captation du prestige de l’écrivain que j’ai nommé le proustige. Dans son livre La Meuse sentimentale, Michel Bernard a bien compris ce glissement de la madeleine, de Commercy à Proust, du vernaculaire au savant : « Le recul de la madeleine de Commercy au profit de celle de Proust marque l’avantage pris par la culture universitaire sur les vieux repères provinciaux qui situaient dans les buffets de la gare les véritables conservatoires d’un patrimoine des arts de la bouche. La France, en somme, comme une carte ferroviaire du tendre et du mœlleux ».

Tradition contre proto-madeleine

Quel rôle La Recherche a joué dans cette notoriété nouvelle ? En dehors des frontières, il est sans aucun doute considérable et en fait un point de rencontre entre le soft power et l’économie mondialisés. La madeleine est ainsi perçue comme le gâteau français par excellence, et elle y est inséparable de Marcel Proust dans la représentation que les étrangers se font de l’art de vivre à la française — synonyme de ventes potentielles à l’export.

Logo ville de Commercy
Le logo officiel de la ville de Commercy

Dans les faits, deux visions de la madeleine s’opposent : du côté de Commercy, on est plutôt confiant dans l’appellation historique et on fait comme si on n’avait pas besoin de Proust, ou comme s’il n’y avait pas eu d’effet Proust — à tort ou à raison. L’analyse des textes officiels émis par la municipalité, les fabricants de madeleines à Commercy et par les Compagnons de la madeleine révèle ainsi moins de 10 mentions de Marcel Proust. Tandis que du côté de Combray et de Cabourg, on en a bien saisi la valeur ajoutée et on cherche la « proto-madeleine de Proust », celle dont il est question dans Du côté de chez Swann, et qui est sans doute une chimère, avec toutes les reconstructions ou les artefacts que cela peut engendrer, mais qui participe des objets st-sulpiciens et du tourisme proustien. Le cercle littéraire de Cabourg, en décernant son prix biennal sous le nom « Madeleine d’or » ne peut être moins ambigu : la Madeleine d’or n’est pas autre chose qu’une périphrase pour nommer Marcel Proust.

Laissons les jolies madeleines aux éditeurs sans imagination…

Calisson vs. Kalisong

Gérard Hocquart, l’actuel président des Compagnons de la madeleine à Commercy, n’a pas lu Proust et n’a pas l’air de trouver qu’il serait intéressant d’associer la pâtisserie au patrimoine littéraire ; mais quand je lui suggère que Proust a fait peut-être davantage de mal que de bien à la madeleine de Commercy, il est d’accord avec ce constat. Ici, je parle bien de l’appellation non contrôlée madeleine de Commercy : la célébrité mondiale du passage de la madeleine dans Du Côté de chez Swann a forcément décentré ce gâteau sur la carte de la notoriété spontanée. 

Pour que la madeleine demeure de Commercy exclusivement, il aurait fallu que les madeleiniers demandent à bénéficier de l’Indication Géographique Protégée (IGP) auprès de l’INAO (Institut National de l’Origine et de la Qualité), ce qui aurait permis d’interdire la production en dehors du site, mais aussi et surtout de protéger la recette originale. Les calissons d’Aix ont réussi à empêcher la fabrication de calissons en Chine (le Kalisong), les législateurs chinois estimant que « le calisson d’Aix [est] une spécialité française faisant partie du patrimoine national français » mais le coup est quand même passé très près : le dossier d’obtention de l’IGP piétinait depuis 14 ans, laissant la porte ouverte à toutes sortes d’imitations.

« Il n’y a pas d’IGP parce que les industriels n’y voient aucun intérêt et parce que c’est trop cher » soupire Stéphane Zins de la Boîte à madeleines, un des derniers madeleiniers artisanaux de Commercy, dans un téléphonage de février 2019, qui dirige la fabrique avec son frère. L’entreprise familiale est née en 1951, elle fabrique 4 millions de madeleines par an et emploie 7 à 8 personnes.  L’activité est largement tributaire de l’attrait de la région, et de sa capacité à valoriser son patrimoine au sens large : « Les ventes sont saisonnières, portée par le tourisme de la Grande Guerre, de Jeanne la Pucelle et du ski à Gérardmer pendant les vacances scolaires ».
Cependant, et pour en revenir à la perte de « souveraineté commercienne » de la madeleine, une  analyse des recherches Google en 2018 vient confirmer cette réalité. 

À la Recherche Google de la madeleine

En 2018, le volume de recherches Google pour le mot-clé « madeleine » en France était de 368000 par mois en moyenne, mais sous ce nom il peut s’agir aussi bien du gâteau, du prénom, de l’église, d’un quartier ou de beaucoup d’autres choses encore.
La recherche Google mensuelle pour « proust » (on omet les capitales lorsqu’on documente les mots-clés) est en moyenne de 74000.
« madeleine recette », « recette madeleine », « recette de madeleine » et « madeleine mœlleuse » totalisent 75100 recherches mensuelles en moyenne.
Quant à « madeleine de proust », « la madeleine de proust » et « proust madeleine », le volume moyen de recherche est à 21300 par mois. La madeleine de Commercy est seulement à 2400 recherches mensuelles, soit 8,8 fois moins que les recherches associées à la madeleine de Proust. Et la madeleine de Commercy fait moins bien, par exemple, que le calisson d’Aix (6600 recherches par mois).
Mais si on se rapproche de Commercy en géolocalisant les recherches Google à Nancy, la hiérarchie est bouleversée : « madeleine de commercy » et « madeleine commercy » en cumul font jeu égal avec « madeleine recette » (70 recherches mensuelles), tandis que la totalité des recherches avec les mots « proust », « madeleine » et « marcel » atteint 60 par mois.
En Normandie, la madeleine de Commercy fait l’objet de 50 recherches Google mensuelles et, en Eure-et-Loir, de seulement 10.

L’eucharistie proustienne

La pluralité de sens de l’expression la madeleine de Proust — avec son génitif ambigu (le Questionnaire de Proust en est un autre) qui la fait ressembler à une authentique Appellation d’Origine Contrôlée (AOC) —, à la fois gâteau, symbole et vecteur de la mémoire involontaire, allégorie du souvenir d’enfance, poncif absolu, etc. est devenue une puissante arme de notoriété contre laquelle la madeleine de Commercy ne paraît pas pouvoir lutter. Et cette forme d’évidence dans l’expression Madeleine de Proust, Maxime Beucher, créatrice et directrice de la société du même nom, a bien compris qu’il pouvait s’agir d’une opportunité de marché. Certains gardiens du temple commercien ont beau essayer d’enrayer cette mécanique implacable, comme l’agence culturelle et gourmande de Nancy La Madeleine, qui a bien sûr tout intérêt à ce qu’on regarde la Lorraine plutôt que Proust  — « Car nous sommes au regret de briser ici un mythe pour ceux qui ne le savent pas déjà, mais il faut savoir que pour ce fameux passage de son livre, Du côté de chez Swann, l’auteur avait d’abord songé à faire tremper dans la tasse de thé de son narrateur… un morceau de pain grillé ! Et oui, Marcel Proust n’a peut-être jamais trempé de madeleine dans une tasse de thé au cours de son enfance ! » lit-on sur leur blog — rien n’y fait : l’eucharistie proustienne, la transsubstantiation de Proust et de la madeleine est bien trop forte, et trop avancée… 

Remerciements à Karine Perrier, Brice Narjoux, Maxime Beucher, Marine et Florent (agence La Madeleine), Stéphane Zins & Gérard Hocquart.

À LIRE
Il était une fois… la madeleine, Michel Caffier, La Nuée Bleue, 2006.


4 Comments

de Vengohechea · 14 août 2019 at 18 h 25 min

Essayez de trouver ce livre délicieux qui s appelle les rillettes de Proust…

Aurellyen · 10 mars 2020 at 11 h 51 min

Ah, ces pages roboratives lues sur Proustonomics ! Je ne m’en lasse pas, et au bureau, à l’heure du thé, je prends aussi un sachet de madeleines industrielles au distributeur de l’espace de convivialité (nom déposé par nos aménageurs).
Juste une précision sur une fausse idée savamment construite par un autre marketing territorial de la fin du XXème siècle, celle du chemin de Compostelle : en gros lier les marques actuelles de randonnées vers le nord-ouest de la péninsule ibérique aux pratiques du moyen-âge est faux. Voir http://www.slate.fr/story/76882/compostelle-invention-moderne qui renvoie à une thèse d’histoire très bien documentée, et dont la méthodologie scientifique a pu inspirer les articles récents déconstruisant la fausse apparition de Proust dans un film de 1904, voir sur ce site https://proustonomics.com/la-madeleine-sans-proust/ .
Tiens, la Madeleine !

    Nicolas Ragonneau · 10 mars 2020 at 12 h 12 min

    Cher Aurellyen, merci ! quant aux pratiques médiévales, je n’en parle pas trop et ne m’avance pas sur ce terrain ! je fais juste référence à une brioche médiévale en forme de coquille st-jacques, et évoque seulement la route des pélerins vers St-Jacques via Illiers, qui semble en effet très récente.

Nina · 22 février 2022 at 16 h 08 min

J’ai grandi régalée de madeleines de Commercy par ma famille de Lorraine. J’ai lu A la Recherche du temps perdu, mais je ne m’étais jamais posé la question d’où venait la madeleine dont parlait Proust, cela me paraissait aussi évident qu’un Camembert qui vient de Normandie – une madeleine vient de Commercy ! Après maintenant 3 décades à l’étranger j’en rapporte toujours quand je visite la France. Oh j’ai vu des madeleines locales dans les supermarchés du pays où j’habite, avec un petit drapeau français sur le paquet, mais c’est une cruelle déception, ça n’en a que la forme, pas la substance ! J’ai récemment décidé d’en refaire moi-même, et j’ai cherché sur google, en Francais et en Anglais, juste « madeleines » , sans ajouter Commercy, parce que comme le Camembert de Normandie, les madeleines ne peuvent être *que* de Commercy ! 🙂

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