Les Assises du Temps perdu d’Anthony Guerrée

Anthony Guerrée, jeune designer de meubles, publie Les Assises du temps perdu aux éditions Bouclard, une plaquette magnifiquement fabriquée, qui documente comment les personnages de la Recherche lui ont inspiré une gamme d’assises (chaise, fauteuils et tabouret).

On avait découvert le beau travail d’Anthony Guerrée à la Galerie Gallimard à l’occasion de l’exposition « Proust, prix Goncourt » en septembre 2019.
En 2013, il lit la Recherche et comme tant d’autres devient la victime consentante du sortilège proustien. Diplômé de l’école Boulle, le designer fréquente le roman-fleuve avec l’œil du professionnel des Arts Décoratifs, mais aussi avec le regard d’un fin sociologue. Il voit la présence réelle du mobilier et la manière dont l’écrivain s’en sert pour « asseoir » la personnalité de ses personnages : « Proust a compris le pouvoir d’évocation des arts décoratifs et s’en sert pour donner encore plus d’épaisseur à ses personnages ». Et il ajoute : « En proposant une posture physique, une assise véhicule aussi une posture sociale ». Ainsi, Anthony Guerrée entreprend de « chaisifier » Albertine, Odette, Swann, Charlus, St-Loup, Bergotte, Vinteuil, Elstir. Certaines assises restent au stade de croquis, d’autres sont fabriquées et éditées comme les sièges St-Loup et Charlus.

Une fabrication impeccable

Ce dialogue fécond entre design et littérature donne naissance à une plaquette originale, tirée à 500 exemplaires aux dépens des éditions Bouclard. Sa fabrication impeccable en fait un des plus beaux livres jamais édités autour de Proust, pour un prix raisonnable (13 €). Papier, typographie, mise en pages, tout en fait un livre-objet indispensable pour les proustophiles bibliomanes, jusqu’à la magnifique reliure à la suisse et le fil de reliure un peu laineux. Les Assises du Temps perdu présente les cahiers de recherches d’Anthony Guerrée, les dessins préparatoires, précédés d’une préface de Jérôme Bastianelli, président de la Société des Amis de Marcel Proust, et suivis d’une postface d’Émilie Houssa. L’ouvrage est disponible sur le site des éditions Bouclard et dans quelques librairies.